Retour d'expérience: à Beauvechain, les fleurs poussent sur le béton

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Un espace bétonné au profit de la biodiversité et à moindre coût ? C’est possible !
Ou… comment faire pousser des fleurs sur du béton

Par Vincent Bulteau, conseiller en environnement

Jusqu’en 1976, la Maison Communale de Beauvechain regroupait également l’école des garçons et la poste. De ce passé sont restés pour partie : une cour de récréation en petites dalles de béton et une pelouse. Ceinturé par un mur, cet espace se trouve à l’arrière du bâtiment, exposé à l’ouest.

Au début des années 2000, entraînée et interpellée par la gestion différenciée des espaces verts, la commune de Beauvechain et les autorités locales ont, petit à petit, reconsidéré la méthode mais aussi l’aménagement des espaces publics afin de limiter les produits phytopharmaceutiques.

C’est ainsi que l’espace cour et jardin de la maison communale m’a servi, et me sert toujours, de zone de tests et d’expériences à renouveler ou pas, dans les espaces publics.

b3Mars 2011 a donné un coup d’accélérateur à ce changement par l’arrivée du "plan Maya" qui annonçait la suppression des pulvérisations, effective depuis le 1er juin 2014 à Beauvechain. En parallèle, parmi les expériences menées, il y avait l’étrépage et le semis d’une bande d’un mètre de large de pré fleuri le long de la cour et une réflexion était menée pour la démonter et l’enherber pour en faciliter la gestion. Ce démontage était compliqué, car les engins n’avaient pas accès à cet espace sans passer au travers de la maison communale : un travail de forçats, à la main. C’est cette difficulté de mise en œuvre qui a permis à une idée folle de germer…

Trois ans après le semis, la bande de pré fleuri avait pratiquement disparu. Ce constat pratique, corroborait mes prévisions… Mais en y regardant de plus près… Dans les joints de la cour voisine, fendus par l’âge, poussaient des coquelicots, bleuets et autres marguerites : rachitiques, mais en fleur !

Je me suis souvenu, au gré de mes promenades sur les coteaux mosans et les pelouses calcaires, de leurs richesses en dicotylées et la difficulté des monocotylées à s’installer. Du substrat, il y en a, mais très peu. 

Et puis, le béton, c’est une roche basique. Je me suis donc imaginé que la cour que j’avais l’habitude de voir de mon bureau était un rocher calcaire. Il ne manquait qu’un peu de substrat. A cette réflexion, une autre observation m’est revenue : suite à une visite sur la base militaire de Beauvechain, j’ai pu admirer un morceau de piste créé par les Allemands durant la seconde guerre mondiale et abandonné depuis. Cette zone bétonnée et effritée par l’âge avait laissé apparaître une végétation abondante, basse et particulière. N’étant pas botaniste, c’est la diversité végétale, colorée et la quantité de papillons qui m’avaient interpellé.

En septembre 2014, notre ouvrier attitré aux espaces verts, Anthony Hubeaux, a eu pour mission particulière de verser des brouettes de bonnes terres d’excavation, surtout sans humus, sur la cour et également de veiller à ce que la hauteur du substrat soit hétérogène : entre 0 et 1,5cm. La cour a été semée dans la foulée avec un mélange pour pré fleuri certifié indigène (liste ci-jointe) de la société ECOSEM.

La première année (été 2015), le résultat était modeste. Pendant que les rosaces des bisannuelles se forment, les pionnières qui donnent le peps de la première comme le Chrysanthème des moissons, le coquelicot ou le bleuet ont eu du mal à s’exprimer. Le retour était donc plus que mitigé.

C’est à partir du printemps 2016, que le changement fut le plus significatif avec l’apparition d’un champ de Marguerites et de Compagnons blancs. Les pionnières ayant quasiment disparu.b2

Tircis, Machaons et autres insectes butineurs ont colonisé les lieux et pas seulement ; en fauchant une partie, les employés de l’administration ont investi les lieux comme réfectoire de plein air lorsque le temps le permet.

Au printemps 2019, Hélène Aimont du GAL Culturalité a effectué un inventaire botanique de la zone pour révéler que, à l’exception des plantes pionnières, toutes les espèces semées étaient encore visibles. Fin juin 2019, lors d’une visite de zone, Julien Taymans a découvert plusieurs pieds de Gnaphale blanc jaunâtre (Pseudognaphalium luteoalbum).

Par la gestion particulière de cette cour, d’année en année le pré fleuri s’embellit et est devenu pérenne. Le principe est simple, un espace est tondu autour du pré, ce qui en donne l’aspect entretenu, la facilité d’accès et d’observation. Un fois l’an, en septembre, il est fauché. Les fanes sont laissées au sol pendant 2-3 jours ensoleillés, sans une goutte de pluie. Puis, elles sont exportées. Cette action permet d’ensemencer.

 

Cette expérience concluante permet d’autres perspectives aux espaces bétonnés au profit de la biodiversité, tout en l’intégrant au paysage, à moindre coût.

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Liste des espèces semées: 
Achillea millefolium
Agrostemma githago
Agrostis tenuis
Centaurea cyanus
Centaurea thuillieri
Consolida regalis
Cynosorus cristatus
Daucus carota
Echium vulgare
Festuca rubra
Galium mollugo
Geranium pratense
Geranium pyreneicum
Glebionis segetum
Hypericum perforatum
Leucanthemum vulgare
Lotus corniculatus
Lychnis flos-cuculi
Malva moschata
Matricaria recutita
Medicago lupulina
Origanum vulgare
Papaver rhoeas
Poa pratensis
Reseda lutea
Senecio jacobaea
Silene latifolia alba

 

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Contactez notre conseillère technique Célia Larrinaga-Balseiro et faites-lui part de ce que vous avez mis en place!